any colour you like

Gwendolyn Seabrook

they took your life, but they could not take your pride

× You always got special treatment
01 Gwen a toujours eu une relation complexe avec ses parents. Peut-être avaient-ils trop d’attentes envers elle, peut-être sont-ils simplement trop différents. Enfant unique, une famille remplie de traditions. Des idéaux qui ne sont pourtant pas les siens. Elle ne déteste pas ses parents, mais elle est convaincue qu’elle se porte mieux si elle réduit au maximum leurs rapports. 02 Enfant, elle a toujours été comme une poupée pour sa mère. Une personne qui était là pour être modelée selon ses propres désirs. C’est ainsi qu’elle a concouru – et  remporté – dans de nombreux beauty pageants. Un rituel qui s’est prolongé jusqu’à ce qu’elle soit suffisamment âgée et maligne pour saboter ses chances à chaque concours. A ce jour, sa chambre d’enfant est la preuve de son passé de crinolines et diadèmes. Une pièce figée dans le temps depuis cette rébellion, vestige du temps où elle était obéissante. 03 Elle est mariée depuis six ans avec le même homme. Un mariage terne, plat. Une relation plus pratique que passionnelle. Elle n’est pas même certaine d’avoir déjà éprouvée de l’amour pour lui. La rencontre de deux bonnes familles, une union qui serait profitable tant à la carrière de Monsieur qu’à la situation précaire dans laquelle la famille de Gwen s’était coincée. Si leur mariage n’en était pas un arrangé, disons que l’union avait été méticuleusement calculée.  04 Malgré l’aisance financière et leurs années de ménage, ils n’ont jamais eu d’enfant. Ils ont essayé durant un certain temps, mais ça ne fonctionnait pas et aucun des deux n’avaient envie d’entamer des traitements de fertilité. Si sa belle-mère ne manque pas de faire allusion à ce manquement à son devoir d’épouse, Gwen n’en prend plus aucune remarque et change aussitôt de sujet. 05 Elle a un secret qu’elle n’a jamais avoué à personne : elle a fait une fausse couche il y a plusieurs années. Lorsqu’elle avait vingt-cinq ans. L’épreuve fut difficile à supporter pour elle et, à ce jour, elle se surprend encore à songer souvent à cet enfant qu’elle a perdu, à ce passé dont elle ne parle jamais. 06 Adolescente, elle avait postulé dans toutes les universités qu’elle considérait suffisamment éloignées de la maison. Elle avait cette envie, cette démangeaison de partir loin de ses parents, loin de cette maison. L’appel de la liberté était particulièrement fort. Elle a finalement choisi d’intégrer Columbia. L’Ivy League. A la hauteur de la réputation familiale, quoi qu’elle réussissait à insulter son père qui avait fréquenté Cornell. L’université n’était pas si loin de sa ville natale, mais New York offrait une liberté plus vaste que dans ses rêves. 07 Gwen a fait des études d’arts plastiques. Un domaine un peu regardé de haut de ses parents qui espéraient plutôt voir leur fille s’intéresser à quelque chose de plus concret. De toute façon, les attentes étaient les mêmes, peu importe le diplôme : avoir une bonne éducation, trouver quelqu’un avec une éducation similaire, se marier, puis rester à la maison. Un mode de vie qui était loin de lui plaire – elle avait toujours un peu regardé sa mère de haut. Elle la trouvait insipide. Elle ne comprenait pas comment elle pouvait accorder tant d’importance à sa routine alors qu’elle ne réalisait au fond rien de bien important. 08 Ironiquement, Gwen a aujourd’hui ce même mode de vie. Des journées meublées de DAR meetings, d’organisation d’événements caritatifs et de shopping. La jeune fille qui rêvait de peindre sa vie de toutes les couleurs possibles vivait maintenant dans un mode fait de blanc immaculé. Elle a toutefois une petit moment dans sa semaine où elle se sent elle-même. Ce club de lecture. Enfin, le livre leur sert plutôt d’alibi et, entre elles, elles se servent des margaritas. Un petit club social de femmes qui parlent sans se censurer et qui espèrent que les murs n’ont pas réellement des oreilles. 09 La chambre de bébé de leur magnifique demeure a été reconvertie depuis quelques années en atelier pour Gwen. Une attention délicate de son époux – elle le soupçonne depuis d’avoir quelque chose à se faire pardonner. C’est là qu’elle écoule les heures lors de ces nuits où le sommeil se fait difficile à trouver. 10 Depuis quelques mois, elle a un contrat avec une petite galerie d’art de Philadelphie. Sous un pseudonyme, elle expose des toiles. Elle ne le fait pas pour les vendre. C’est pus pour se prouver à elle-même qu’elle est capable de faire quelque chose, de créer. Que celle qu’elle a déjà été – et fière d’être – est encore quelque part en elle. Elle a vendu quelques toiles, une grande fierté. 11 Durant la vingtaine, elle a passé quelques années avec un homme. Sa première relation sérieuse – peut-être la seule fois où elle a été réellement amoureuse. Un musicien, un artiste comme elle. Elle avait été instantanément attirée par lui, fascinée, envoutée. Complètement conquise, il était tout ce qu’elle rêvait d’être – libre, créative, téméraire. Ils ont été ensemble durant de nombreuses années, ont été fiancés, même. Gwen pense encore à lui. Souvent. En réalité, il n’y a pas une toile qu’elle a faite depuis qui ne lui ait pas été inspirée de lui – que ce soit d’un souvenir ou d’un sentiment. Il est là, partout dans ce qu’elle fait. 12 Ils étaient heureux, dans leur petit cocon de bohèmes. Leur petit appartement rempli de couleurs et de vie. La période la plus heureuse de sa vie, un lointain souvenir qui la hante encore si souvent. Tout ça s’est envolé il y a plusieurs années. C’est elle qui a pris la fuite. Elle a perdu leur enfant – enfant qu’ils ne savaient pas qu’ils attendaient – et puis elle n’a pas pu le supporter. Elle ne trouvait pas les mots pour le dire, mais elle ne pouvait pas passer à autre chose. Alors elle a fait ce qui semblait logique : elle est partie. Des années passées exilée du joug de ses parents, et elle couru directement à eux en laissant derrière elle le seul qui ait jamais compris qui elle était. 13 Gwen est presque certaine que son époux a une maîtresse. Elle ne joue pas les femmes jalouse, n’embauche pas de détective privé, n’inspecte pas le col de ses chemises. Elle ne s’investie pas dans cette relation, elle le sait. S’il n’est plus là physiquement, elle, c’est mentalement qu’elle s’évade. 14 Elle est atteinte de quelques troubles du sommeil. Elle est somnambule et somniloque. Rien qui ait pu la mettre en danger, mais ça lui a bien offert quelques situations gênantes. Réveillée, couchée sur une chaise longue du jardin, par le jardinier ou encore complètement recouverte de peinture dans son atelier, sa dernière toile gâchée. 15 C’était à cause d’un accident de la route qu’elle a fait une fausse couche. Elle en est ressortie abîmée psychologiquement, bien qu’on ne voyait qu’un bras dans le plâtre et quelques ecchymoses sur sa peau. Depuis ces onze dernières années, elle n’a pas conduit. Elle prétend aimer mieux marcher ou se faire conduire par le chauffeur de son mari. En vérité, elle est terrifiée à l’idée de se trouver derrière un volant à nouveau.

en vrac lorsqu’elle s’ennuie, elle dépense. achète des antiquités, des toiles, des tapis hors de prix, des chaussures. n’importe quoi qui comble son ennui. ✻ elle est le genre à donner es billets de vingt dollars au sans abri et leur apporter un bagel et un café. ✻ elle ne supporte pas le silence. elle fait jouer des vinyles en boucle sur une vieille table tournante d’époque. si elle lit, elle suivra la femme de ménage dans chaque pièce alors qu’elle passe l’aspirateur. ✻ elle est une piètre cuisinière, malgré qu’elle réussi quelques plats à la perfection. ✻ elle raffole du vieux cinéma. ✻ elle visite les musées de la ville à chaque fois qu’une nouvelle exposition est annoncée. c’est le genre de personne qui verse une larme devant un tableau. ✻ elle a la fâcheuse habitude d’être en retard, tout le temps. ✻ elle ne dort jamais avec sa bague de mariage et oublie souvent de l’enfiler. ✻ des fois, elle y pense, à sa bague, et la laisse tout de même sur sa commode. ✻ elle connaît quelques tours de magie. elle a toujours un grand succès avec les enfants. ✻ sa demeure est toujours égayée de bouquets de fleurs fraîches.

PSEUDO/PRÉNOM | J. AGE | Vingt-quatre ans. OU AS-TU CONNUS LE FORUM | Bazzart. CRÉDITS PHOTO ET CITATION | dailydormer, u2 AUTRE | inspiré de this is us, je meurs !